A Veltheim, la boulangerie-confiserie Richner AG aura été pendant un peu plus de 175 ans, une boulangerie appréciée de la population, proposant des produits de qualité. Jusqu’en 2020. Aujourd’hui, outre des produits de boulangerie et de pâtisserie, elle produit également du chocolat artisanal pour la vente directe et pour le B2B. Les trois dernières années ont été une période de bouleversements, d’effervescence et d’improvisation, mais aussi de dynamisme et d’enthousiasme. 

A Veltheim, la boulangerie Richner datant de 1847 est dirigée en septième génération par Barbara et Karl Richner, et depuis 2018 conjointement avec Andi Lüscher. Une première étape d’extension importante a été franchie après l’arrivée de ce dernier : une partie du jardin, attenant à l’espace de production, a été sacrifiée pour le secteur de la pâtisserie.

Les choses sérieuses ont commencé environ deux ans plus tard : en juillet 2020, en pleine pandémie, la boulangerie-confiserie Richner a repris les machines de production et d’emballage de la confiserie Berner de Rheinfelden (AG). L’assortiment de produits chocolatés semi-finis et finis a été considérablement élargi, la fabrication des célèbres croquants au nougat de Berner ayant été intégrée.

Attention, prêt, partez !

La reprise a été pliée en trois mois seulement. « Il fallait faire vite », se souvient Karl Richner, « selon la devise : Attention, prêt, partez ! ». En mars 2020, les trois professionnels ont visité la confiserie Berner à Rheinfelden. Le contrat de vente a été signé le jour de la fête des Mères. « A ce moment-là, nous avions certes une entreprise, mais pas encore de place pour le parc de machines », se souvient Karl Richner.

Les trois capitaines D.g.a.d. : Karl Richner, Barbara Richner et Andi Lüscher

Le hasard a bien fait les choses : des locaux de production étaient disponibles dans la zone industrielle. Il ne restait plus qu’à les préparer pour une production alimentaire ; en posant du carrelage, en construisant et en peignant des murs, et en revêtant les sols. En parallèle, des visites ont été effectuées chez les clients de Berner, et de nouveaux prospectus réalisés. En juillet, plusieurs voyages en camion ont permis de transporter les machines de Rheinfelden à Veltheim.

Etape suivante fin 2022

L’étape suivante est venue une fois les processus stabilisés. Fin 2022, Heidi Chocolaterie Suisse SA a fermé son site de production à Lucerne. « Andi a été l’élément déclencheur », relate Karl Richner. « Nous n‘étions pas activement à la recherche de quoi que ce soit », ajoute Andi Lüscher. C’est la clientèle de Heidi qui a attiré l’attention des trois protagonistes. En quatre ans, l’entreprise a connu un succès fulgurant. « La curiosité a certainement attiré les clients.

Toutefois, s’ils sont restés c’est certainement aussi parce qu’ils ont apprécié notre assortiment. » Hormis des produits au dressage modernisé, le patron met un point d’honneur à travailler des matières premières locales. « Nos fonds de tartes sont préparés avec des œufs de la ferme de mon frère, du beurre de la fromagerie, de la farine d’Echallens. Fils de paysan, je me vois mal prendre du blé étranger. »

En un temps record

Deux collaborateurs doués d’un grand savoir-faire ainsi qu’une partie du parc de machines et de la clientèle ont migré à Veltheim. L’offre a été élargie avec le private label (sous-traitance) et avec des produits bio. L’ensemble de l’opération n’a pris que trois semaines. Il a fallu s’informer sur la clientèle de Heidi et adapter les processus en un temps record.

« Avec Berner et Heidi, nous avons franchi deux étapes stratégiques importantes »

Karl Richner

Grâce aux nouvelles machines, certains processus de travail ont pu être sensiblement améliorés et des synergies exploitées. La fabrication des napolitains a notamment pu être rationalisée : ce qui prenait auparavant un jour et demi peut aujourd’hui être réalisé sans interruption, sur une surface réduite, car il y a désormais suffisamment de chambres froides et de moules à disposition.

Deux étapes stratégiques importantes

« Avec Berner et Heidi, nous avons franchi deux étapes stratégiques importantes », constate rétrospectivement Karl Richner, avec satisfaction. Différentes réflexions sur la direction que devait prendre la boulangerie-confiserie avaient déjà eu lieu au préalable. L’idée d’une deuxième filiale avait été envisagée, puis abandonnée ; Barbara Richner, responsable entre autres de la vente, attachant notamment une grande importance à la proximité avec les collaborateurs du magasin, et donc au respect de la philosophie et des valeurs de l’entreprise.

Bio et artisanat

« Nous devions faire quelque chose contre la concurrence des grands distributeurs, des discounters et des boutiques de stations-service », résume Karl Richner. La chance leur a souri : la fabrique de chocolat Gysi à Berne a fermé ses portes lorsqu’ils ont repris Berner, et Läderach a annoncé vouloir réduire fortement ses activités B2B suite à la conclusion de l’affaire avec Heidi.

Karl Richner produit des pralines nobles depuis des années déjà, en collaboration avec un viticulteur régional. Le label bio et le développement durable ont permis à l‘entreprise de découvrir un domaine pas encore très exploité. Le cacao provient du Ghana et de Madagascar. Le développement durable est également mis en avant avec le soutien d’un projet de caisse maladie pour les paysans du village. L’emballage des tablettes de chocolat bio est aussi respectueux de l’environnement, puisqu’il est fabriqué à partir des déchets des fèves de cacao. De plus, tout est 100 % artisanal, selon Andi Lüscher.

Ce chocolat bio artisanal est nouveau dans l’assortiment de la boulangerie Richner.

Le couple Richner et Andi Lüscher reviennent sur trois années intenses. Leur boulangerie-confiserie est passée en très peu de temps d’une petite entreprise à une entreprise de taille moyenne. Deux exemples chiffrés : en 2001, lorsque le couple Richner a repris l’entreprise, 15 personnes (10 postes à plein temps) étaient employées, aujourd’hui elles sont 40 (20 postes à plein temps). Jusqu’en 2017, la boulangerie-confiserie Richner produisait environ 500 kg de chocolat, en 2022, c’était déjà une tonne et cette année, Andi Lüscher prévoit deux tonnes.

Une bonne interaction

« Nous avons produit, vendu, déménagé, peint les murs, maçonné, assemblé… et dormi entre-temps », raconte Barbara Richner en souriant. Mais cette performance n’aurait pas été possible sans la participation de toute l’équipe, et elle lui en est reconnaissante. Une direction qui travaille ensemble sous une telle pression pendant un certain temps doit être en harmonie. Le respect mutuel est important et chacun a par ailleurs son domaine de compétences, explique Barbara Richner. Son mari Karl Richner est responsable de la boulangerie-pâtisserie, Andi Lüscher de la confiserie, et elle s’occupe avec lui des travaux administratifs, tout en gérant le commerce de détail.

Des surnoms pour les machines

Les reprises ne se sont toutefois pas déroulées sans heurts. « Nous avons fait les frais de notre inexpérience », constate Karl Richner de manière critique, « et nous avons beaucoup « tâtonné ». » Avec le recul, au moment de l’entretien avec « Panissimo », les trois peuvent en rire de bon cœur et les anecdotes s’enchaînent – « nous pourrions écrire un livre… ».

Andi Lüscher au bras oscillant pour la découpe des moules.

Nous avons parfois dû agir dans l’urgence, et donc faire preuve de flexibilité et de rapidité de réflexion, la quantité de marchandises ayant notamment été sous-estimée lors des deux reprises. De fait, il a fallu louer à court terme un entrepôt supplémentaire dans la zone industrielle au début de l’année, pour éviter de devoir se débarrasser de tous les « magnifiques moules et de bien d’autres choses, ce qui aurait été vraiment dommage », explique Barbara Richner.

Andi Lüscher, Karl Richner et un collaborateur ont suivi trois jours de cours pour la machine de dosage OneShot. Elle porte d’ailleurs le surnom d’Urs, comme son chef concessionnaire. Toutes les machines ont un nom. L’enrouleuse s’appelle ainsi Trudi – elle pèse 1,3 tonne et a été récupérée chez Gysi à Berne –, celle du nougat Käthi. Elle a 70 ans, vient de Berner, et est un peu récalcitrante, comme aime à le dire Karl Richner.

Il n’y a plus de pièces de rechange pour cette machine. Un savoir-faire artisanal est donc requis. La machine d’emballage à napolitain a été livrée démontée. il a fallu l’assembler sans mode d’emploi. Heureusement que Karl Richner et Andi Lüscher sont des pros tant de la boulangerie-confiserie que de la mécanique. Des connaissances numériques sont d’ailleurs également indispensables, et Andi Lüscher en a.

Trois capitaines

Les membres de la direction ont mené le navire « Richner » dans des eaux pas toujours calmes, avec courage et détermination. Rien d’étonnant donc à ce que trois casquettes de capitaine soient symboliquement arborées au bureau. Une certaine peur s’est néanmoins parfois également immiscée. « C’était le chaud et le froid, d’une part beaucoup d’euphorie et l’envie d’aller de l’avant, mais d’autre part aussi une certaine crainte de l’avenir », explique Barbara Richner.

Durant cette période, les trois professionnels ont reçu un grand soutien de leurs collaborateurs et collaboratrices ; de même, des réactions de toute la Suisse les ont réjouis : « Soudain, nous avons été connus dans toute la Suisse, et non plus seulement dans la région. » Pour Andi et le couple, une chose est sûre : « Ces deux reprises nous ont permis de progresser sur le plan technique, professionnel et personnel. » Et à plusieurs reprises au cours de l’entretien, ils ont tenu à relever que tout – du pain au chocolat – est et restera du pur artisanat.

Ouverts aux souhaits de la clientèle

Il n’est donc pas étonnant que les trois entrepreneurs aient décidé de se « calmer » et d’optimiser les processus de travail. Ils sont toutefois toujours ouverts aux demandes de la clientèle. Ils ont encore de la capacité, et ont régulièrement prouvé leur grande flexibilité et leur proximité avec la clientèle au cours des derniers mois.

Claudia Vernocchi


Galerie de photos…»


Bäckerei Richner AG, Veltheim (AG)

  • Fondation : 1847
  • Direction : Barbara und Karl Richner, Andi Lüscher
  • Collaborateur s: 40 (20 plein temps)
  • Apprentis : 6
  • Point de vente : 1
  • baeckerei-richner.ch

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