A peine lancée, la boulangerie-tea-room tant rêvée de Nathalie et Cyril Bezençon est confrontée à la crise du coronavirus. Abattus, ces artisans de Goumoens-la-Ville (VD) prennent des mesures. Au fil des jours, la clientèle revient, et avec elle le moral du couple. Récit…

A Goumoens-la-Ville, les villageois possèdent leur boulangerie-pâtisserie-tea-room, depuis le 25 octobre. L’établissement est la propriété de Nathalie et Cyril Bezençon. Elle est cuisinière, et lui boulanger. Ce projet trottait dans la tête de l’enfant du village, depuis longtemps. Concept, financement, construction… Quatre ans ont été nécessaires pour le concrétiser et transformer un champ en un immeuble composé d’un laboratoire, d’un magasin, d’un tea-room de 40 places, d’une terrasse de 25 places et de sept logements. « N’ayant pas les fonds propres nécessaires, il s’agit d’une propriété par étages. Les banques refusaient de prêter de l’argent sans revenus locatifs assurés. Nous sommes donc trois propriétaires. Avec mon épouse, nous possédons la boulangerie et un appartement. »
Très rapidement, le succès est au rendez-vous. La production passe de deux à quatre personnes. « Au début, je voulais travailler uniquement avec ma belle-sœur pâtissière-confiseuse. Je pensais que dans un village de 1200 habitants, la pâtisserie n’allait pas fonctionner plus que tant. En fait, ce n’est pas le cas. Nos produits intégralement faits maison plaisent et nous réalisons une quantité astronomique de pâtisseries ! » L’entreprise a également lancé des brunchs le dimanche. Ils affichent complet plusieurs mois à l’avance.
A la vente et au service, Nathalie Bezençon est responsable d’une quinzaine de collaborateurs. A court terme, son objectif est de rejoindre les fourneaux afin de s’occuper des menus du jour.

« De la folie ! »

Mais… A la mi-mars, le coronavirus bouleverse la success-story. « A la suite des mesures du Conseil fédéral, ma femme et moi étions démoralisés. Nous nous sommes dit que nous allions tout perdre », se souvient le boulanger. Les serveuses mises à l’arrêt, un tournus entre les vendeuses au pourcentage s’organise.
La première semaine de « confinement » les clients sont prudents. Dès la deuxième, en revanche, les ventes augmentent. « C’est de la folie ! Nous avons bien eu 30 % des ventes en plus », commente M. Bezençon. Les habitudes changent quelque peu : la clientèle se déplace moins souvent, mais achète en plus grande quantité. « Elle se fait aussi plaisir avec des douceurs. Avec les pains, ces ventes de pâtisseries compensent la baisse monumentale de viennoiseries et de sandwichs. »
Entre-temps, la banque demande un bouclement provisoire. « Après discussion et présentation de notre chiffre d’affaires, notre conseiller a estimé qu’il n’y avait pas beaucoup de souci à se faire. Nous avions également l’avantage d’être propriétaires. Nous nous sommes rassurés mutuellement. L’entreprise n’était pas en péril, mais il ne fallait pas que cela dure trop longtemps tout de même. »
Depuis la semaine du 11 mai, le tea-room est à nouveau ouvert. En raison des mesures barrières, le nombre de places a diminué de 28 à l’intérieur, et de 10 à l’extérieur. La mise sur pied d’un chemin de sortie pour gérer la circulation des acheteurs et éviter les croisements dans le magasin explique cette diminution drastique. Les tables se trouvant sur ce passage ont dû être supprimées. « Bien qu’hésitants au regard de toutes ses normes, il fallait ouvrir ; même si ce n’est que pour quinze personnes, c’est autant d’individus qui ne consommaient plus chez nous. »

« Plaisir plus que jamais important »

Au final, l’entreprise devrait engranger peu de bénéfices, mais et surtout aucune perte, selon son patron. De cette période extraordinaire, Cyril Bezençon conservera la nécessité de constamment se remettre en question. « Ce covid nous a forcés à casser la routine. Les clients adorent découvrir des spécialités. Nous avons créé des flûtes à l’ail des ours cueilli par l’un de mes employés, par exemple. Aujourd’hui, nous n’arrivons plus à suivre. Le plaisir gustatif et gastronomique est plus que jamais important ! »
Optimiste de nature, le boulanger vaudois reste confiant pour l’avenir de sa maison. Il espère toutefois que les consommateurs qui sont revenus aux produits locaux, le seront toujours la crise passée. « Si tel est le cas, nous en sortirons gagnants ! »

Cela pourrait aussi vous intéresser

« Proposer des produits traditionnels au sommet de la qualité »

« Nous devrions être fiers de nos apprentis ! »