Depuis l’arrivée de Mélanie Niedegger et Rafael Parreira à la tête du Grini, la boulangerie-pâtisserie d’Ayent (VS) ne cesse de croître. L’effet booster d’une pandémie et une succession d’opportunités ont notamment contribué à la réussite du couple.
En bordure de route, le Grini accueille Ayentôts et clients de passage, depuis presque 40 ans. Rafael Parreira a repris la boulangerie-confiserie des mains de son ancien patron, Yves Constantin, en 2020. « Cela faisait quelques années qu’il parlait de s’en séparer. Le covid a précipité la mise en vente », explique l’actuel propriétaire. L’enfant du village a saisi l’occasion et concrétisé l’un de ses rêves, à 23 ans : « ne pas être un simple ouvrier ». L’acquisition s’est faite en deux temps : d’abord le fonds de commerce, puis les murs.
Mélanie Niedegger a, entre-temps, rejoint l’aventure. Après l’abandon de ses études d’archéologie, la Saviésanne passionnée de pâtisserie a achevé son apprentissage en 2019. « En septembre, j’ai commencé à travailler au Grini. (…) Lorsque Rafael l’a repris, il m’a proposé de gérer la pâtisserie. » Les deux jeunes gens se sont rapprochés. Depuis, ils gèrent en couple la société.
A préciser que Proback a secondé les deux entrepreneurs à leurs débuts, en particulier sur des points d’hygiène et de rentabilité. Ils encouragent d’ailleurs unanimement leurs confrères avides d’indépendance à bénéficier de conseils et d’aide de professionnels.
Croissance multipliée par trois
A en croire l’évolution de leur entreprise, cela semble plutôt leur réussir. En un peu plus de quatre ans, le chiffre d’affaires a triplé. Deux points de vente complètent le tea-room originel : le premier à Conthey (VS), depuis 2022, et le second à Grimisuat (VS), depuis 2023. Pour le premier, une cliente souhaitait ouvrir une épicerie et y vendre certains de leurs produits. Le projet a traîné et capoté faute de moyens financiers. « Le local avec places de parc était toujours à remettre. Il se situait dans le village, en dehors de la zone commerciale. Nous l’avons acheté et rénové durant huit mois », précise Mme Niedegger. Le scénario est plus ou moins identique pour le second : « Il s’agit d’un tea-room que nous livrions qui ne fonctionnait pas. Le gérant nous a proposé d’en reprendre la location. »
Le nombre de collaborateurs a aussi pris l’ascenseur, passant de neuf à une trentaine. Deux tiers œuvrent à la vente et le solde, dont quatre apprentis, à la production. Cela pourrait cependant évoluer à moyen terme. Un projet conséquent, en lien avec la transformation du centre du village en zone piétonne, est en discussion. Les deux artisans n’en diront pas plus.
« Un sacré tremplin »
Le couple estime que le confinement a incontestablement accéléré la croissance de leur établissement. « Les premiers mois ont été très difficiles. Nous étions à flux tendus avec très peu de liquidités », se remémore Rafael Parreira, et sa compagne d’ajouter : « Nous passions notre temps au laboratoire. Il fallait aussi gérer la paperasse liée à la pandémie. Mais comme notre commerce était l’un des rares ouverts, les gens se sont déplacés. Ils ont alors vu que la boulangerie ne s’arrêtait pas à la vente de pain. Cela a constitué un sacré tremplin. »
Après le covid, les ventes à l’emporter se sont perpétuées. « L’essentiel de notre chiffre d’affaires s’est d’ailleurs vraiment déporté sur celles-ci depuis. Cela s’est fait tout seul, notre véritable mérite a peut-être été d’avoir su fidéliser la clientèle. »
Confectionner aujourd’hui pour demain
En plus du magasin et du tea-room, environ 10 % des rentrées proviennent de livraisons. Les deux boulangers-pâtissiers privilégient des institutions telles que l’armée, des cliniques et des écoles plutôt que des hôtels et des restaurants. « Ce choix, explique M. Parreira, limite les périodes creuses que peuvent connaître certains collègues. En saison, nous travaillons beaucoup avec les touristes. Et, lorsque les vacances se terminent nous pouvons à nouveau compter sur nos livraisons. »
Cette décision offre un second avantage sur le plan logistique, selon Mme Niedegger : « Toute notre production est réalisée la veille. Nous respectons les temps de repos et n’utilisons pas d’additifs. Il n’est pas certain que nous pourrions conserver cette façon de faire, en ciblant des établissements publics. Il leur est parfois compliqué d’anticiper les commandes 24 heures à l’avance. »
Quant à ceux qui pensent que volume ne peut rimer avec artisanat, la patronne s’en défend. L’artisanat ne se définit pas au travers des aides à la production utilisées, mais au travers des ingrédients, selon elle. « La quasi-totalité des entreprises disposent d’un pétrin, d’une bouleuse ou d’un laminoir de nos jours. Elles ne sont pas toutes pour autant industrielles. Cela va dépendre des matières premières, du savoir-faire et des processus qui composent les recettes. Plutôt que d’utiliser des produits annexes ou de panification, nous préférons réduire notre assortiment pour atteindre les volumes désirés et être rentables », assure-t-elle.
Johann Ruppen
Infos: Le Grini