Dans le Jura bernois, régionalisme, fait maison et créativité sont les maîtres-mots de la boulangerie-confiserie La Brioche, Orvin (BE), de Manuel Rytz. Les spécialités authentiques y occupent une place de choix. Rencontre avec une équipe de passionnés.

Nombreuses sont les success-stories qui ont débuté dans un garage. Un démarrage atypique qui se retrouve parfois dans la boulangerie-confiserie. C’est le cas pour Manuel Rytz.

Pâtissier-confiseur alors employé dans une entreprise, il abandonne la profession durant dix ans : « J’avais des problèmes avec la qualité des produits proposés. Ouvrir des boîtes ce n’est pas mon truc ». Il revient au fournil en 2009. Il confectionne des articles chez lui et les vend dans son garage, à Près-d’Orvin (BE). « Je l’ai d’abord fait après mon travail. Cela marchait tellement bien que j’ai fini par démissionner pour m’y consacrer à 100 %. »

En 2014, il achète une boulangerie à Orvin : « Le laboratoire était vieux et sur trois niveaux. » En quatre mois, les locaux sont refaits et un tea-room est créé : la Brioche est née.

« Le plaisir de travailler est essentiel »

L’entreprise compte aujourd’hui vingt-deux employés contre trois à l’origine : neuf en production, dix à la vente et trois livreurs. Manuel Rytz attache une importance toute particulière à s’entourer de passionnés : « Le plaisir de travailler est essentiel, pour nous et pour notre clientèle. Je choisis donc uniquement du personnel qui œuvre avec son cœur, et aucun collaborateur n’est pas du métier. »

L’utilisation de matières régionales est un autre impératif de la philosophie du patron : la farine, le sel, le lait destiné à être cuit et la levure. Dernièrement, les emballages et le miel les ont rejoints. « Jusqu’à cet été, le miel provenait du Mexique et du Guatemala. A présent, je m’approvisionne auprès d’une connaissance. Son prix est trois fois plus élevé que celui d’Amérique. Je peux me le permettre, car je n’utilise que 200 kg. »

Tous les produits ne sont cependant pas locaux : les œufs, par exemple, en raison de leur cherté.

De ses matières premières naissent des spécialités maison et créatives. « Nous créons beaucoup de produits ; ce qui constitue l’essence même de notre métier, selon moi. »

« Fous d’épeautre »

Le patron peut notamment compter sur les connaissances et le savoir-faire de Sylvie Despont et d’Adrien Knuchel. Ensemble, ils aiment revisiter, transformer, créer ; mais toujours en s’appuyant sur une base classique. Leur terrain de prédilection ? Le pur épeautre. Pains, tresses, biscuits, bretzels à la saumure, croissants, bonhomme en pâte… Le nombre de créations estampillées Urdinkel ne cesse de croître.

Ces « fous d’épeautre », comme ils se définissent, se sont passionnés pour la vieille céréale il y a deux ans, lorsqu’ils ont répondu à la demande de clients. Le challenge que représentent le travail et les particularités de cette farine contenant moins de gluten les attire. « La stabilité de la pâte au pétrissage et à la cuisson est plus faible que celle d’autres produits », explique M. Knuchel, avant de poursuivre. « Il ne suffit donc pas de lancer un programme et d’attendre. Cela demande de l’attention, il faut se mettre devant le pétrin, observer, écouter. »

L’élaboration de ces produits nécessite de la pratique. Cela a particulièrement été le cas avec les croissants, précise Sylvie Despont, championne romande de pâtisserie et de confiserie : « Il nous a fallu environ trois mois de tests, à raison d’une pâte par semaine. » Les premiers essais n’ont cependant pas été concluants. Et M. Knuchel d’expliquer : « Après avoir passé deux jours au congélateur, les croissants étaient petits et lourds. (…) Lors d’une énième tentative, j’ai remarqué par hasard qu’un tourage spécial offrait davantage de volume et de légèreté ; de quoi pouvoir vendre les croissants. » Mis en avant par le personnel de vente, le produit de boulangerie au léger goût de noix a rapidement rencontré du succès.

Pas de limites

Evidemment, toutes les créations à l’épeautre de l’entreprise ne connaissent pas la même destinée. « Nous avions élaboré des miches au lard, aux noix et aux oignons, très bonnes à mon goût, par exemple. Les clients les trouvaient en revanche trop spéciales. Nous avons alors stoppé leur production et fait autre chose », commente Mme Despont.

Patron et collaborateurs ne sont pas à court d’idées. Pour preuve : lors de l’interview (ndlr : réalisé en décembre), M. Rytz songe à un gâteau des rois Urdinkel. Lorsqu’il expose son envie à ses boulangers, ces derniers l’avaient devancé. La galette figure d’ailleurs dans l’assortiment de la Brioche.

La confection de spécialités à base de pur épeautre aurait-elle des limites ? « Pas pour nous ! », rétorquent les artisans d’une seule voix en guise de conclusion.

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